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13 décembre 2019 5 13 /12 /décembre /2019 10:01

A la veille d’appareiller
.
Un ultime regard vers la maison éclairée sur les hauteurs de la colline
La lucarne sombre cadre la pente dorée à la manière d’un tableau
.
Fini de s'endormir et s'éveiller dans la présence vivifiante de la mer
Bercé tel un ramier sur l'élasticité vaguement instable de l'air 
.
Qu’on éteigne toutes ces étoiles de rosée Il va être temps de partir
Déjà certains oiseaux ont changé On entend partout des cris ignorés 
.
Il fait grand jour et pourtant un enfant en moi galope dans la nuit
On dirait qu’il a tous les chiens invisibles du vent à ses trousses
.
Serait-ce que mon corps est habité d’un autre et ne concorde pas
absolument avec lui-même l’un fragile souple et vif l’autre viellard
.
L’un dont s’est pour toujours détourné la pieuvre au bras de lumière
L’autre qui se débat au coeur d’un buisson de cristal semé d’églantines
.
Qu’on éteigne ces fleurs dont l’aurore impitoyable sème la splendeur
Je veux rester seul avec ce moi dont j’opère sans fin les douleurs

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10 décembre 2019 2 10 /12 /décembre /2019 16:46

L’âme parfaite du Monde 
.
Ne regarde plus vers l’île
dont les frondaisons moutonnent
en couronnes de brocolis sur les roches
accumulées par le soleil couchant
et rebattues par la mer 
qui traduit en écume les cris 
tourbillonnants d’oiseaux effarouchés
.
Perdurable et doux lieu de solitude
frangé de plages hérissées de lis parfumés
secoués au gré des airs iodés...
Qu’il serait plaisant après quelques brasses
en compagnie d’une Aphrodite frissonnante
de s’y échouer à côté d’un beau coquillage torsadé
presque enfoui dans le sable de nacre
.
Ce serait comme une romance
tissée en mots de nuages rose-corail
qui transmigrent par la fente de l’horizon  
à la suite du soleil à la crosse d’or
Et que l’on écoute enlacés depuis le rivage
de l’île casquée de vert au-dessus d’anfractuosités
pourpres inlassablement rebattues par la mer

.
 

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8 mars 2018 4 08 /03 /mars /2018 09:08

 

Sonjanthrope

.

Craquer deux silex dans la nuit pour en faire

gicler le reste de soleil qu’ils contiennent

et son odeur d’étés consumés et de serments

échangés en cachette entre les rangées de sarments

.

Voilà l’unique ressource que le temps propose

aux vieux trafiquants de mots qui se voulaient

poètes en un siècle plus favorable où les pins

étaient plus fiers les cigales plus obstinées

.

Où les roseaux et les chardonnerets flûtaient

plus joliment À l’automne c’étaient les grives

attirées par le violâtre grisant des raisins

au point qu’on ne pouvait ni les faire fuir

.

ni les faire taire Si l’on gesticulait pour les

effrayer elles s’envolaient nonchalamment

se reposaient quatre ou cinq pas plus loin

sans cesser leurs titirlitutis un rien moqueurs

.

pareils entre de vieux neurones aux étincelles

qui s’imaginent durer autant que des étoiles

ou encore aux chocs dans la nuit de deux lexis

exprimant le reste de soleil qu’ils contiennent

 

 

 

 

.

Une mouette

.

Au-dessus de la petite place de mon quartier

plane en se plaignant une mouette à l’élégance

immense D’ailes gris-blanc au double galbe

elle glisse son envergure entre les cheminées

et rase les toits avec une nonchalante virtuosité

Mon pain sous le bras je reste à contempler

ses évolutions jusqu’à ce qu’une décision

subite la pousse à s’éloigner vers la Seine

d’un vol rapide et régulier le long de l’avenue

Les passants pressés m’évitent Ils me jettent

ce regard apitoyé qu’on réserve aux idiots

Emmenant avec moi la fascination d’un rêve

d’intense liberté je me fais violence pour casser

l’hypnose et je tourne au coin de la rue qui va

me ramener jusqu’à la porte de chez moi.

 

 

 

 

.

Torii et « leurre du seuil »...

.

Il est tellement simple d’être juste un écrivain assoiffé de gloire, plutôt qu’un prospecteur qui cherche à franchir, grâce au sésame du langage, telle porte analogue à un mirage en lequel, soit on n’entre pas, soit si l’improbable se produit, l’on pénètre dans un monde qui est, pour une commune mesure, celui qu’on vient de quitter !

.

C’était un anachorète mental ; il n’avait pas d’autre dessein que celui de réussir à formuler une pensée de telle manière qu’elle soit apte à durer davantage que son auteur. Les écrits seuls nous ont transmis quelques parcelles signifiantes de l’âme des humains qui nous ont, depuis des millénaires, précédés. Certes l’art pariétal des grottes de la préhistoire est un témoignage, mais précisément le récit – notamment – lui fait défaut...

.

L’homme est le jouet de l’univers. De cet univers, grâce à la parole, l’imagination poétique, puis la science qui par un processus complexe d’abstraction en est issue, il fait des mondes qui deviennent ses jouets.

.

L’éther de l’univers, en ce qu’il est inconcevable, par l’unification d’une succession d’insuffisances, voire d’erreurs, finit par devenir ce monde physique dont la science construit la seule image exploitable en termes d’efficacité. Cette image n’est jamais achevée, car elle n’est pas la vérité de l’univers mais la conception qu’à travers le filtre de son cerveau, s’en font les êtres humains.

.

La science moderne est une religion réussie, qui a pour divinité l’unité mathématique de l’icône de son monde collectif, celle qui adviendrait si se trouvaient conciliées et amalgamées en une seule les trois équations ultimes auxquelles Einstein, ce poète, était parvenu. Il est assez troublant qu'une trinité soit apparue dans l'affaire...

.

Archimède: celui qui, par la force d’un biais particulier de sa pensée, a donné à la parole le moyen de se bâtir une connaissance capable d'être convertie en réalité, autrement dit appréhension raisonnée du monde matériel : en devenant science physique, cela ouvrait le chemin d’une puissance ignorée.

.

Un chercheur scientifique, c’est quelqu’un qui est inscrit dans les règles d’une collectivité, laquelle contrôle, accepte ou rejette, la fraction de la réalité scientifique qu’il s’est attaché à débroussailler et construire avec les outils collectifs. Un chercheur en poésie est seul, n’est inscrit dans rien, prétend à la responsabilité entière de son monde. Quoi de surprenant à ce que la plupart de ses travaux demeurent incompris ?

.

Il n’y a pas de professionnalisme possible en poésie. Soit l'on en est un amateur, pour ne pas dire amant, solitaire ; soit l'on en sort et ce qu’on aura écrit « professionnellement » aura perdu son essence poétique, pour devenit du texte, du texte sans magie, éventuellement admirable, mais hors de la sphère du poème, quand même il en aurait conservé l’apparence...

 

 

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29 avril 2017 6 29 /04 /avril /2017 18:53
Outre la désincarnation
.
Le poème sur la page
comme une ombre restée
sur le mur ou la cendre
d’un foyer éteint après
le départ du Nomade
.
Voix silencieuse on dirait
un oiseau qui récite des fleurs,
qui les traduit en trilles purs
Et la brise les incline
en signe d’approbation
.
Il est parti mais sur le mur
avec l’écho son ombre attend
.
Insoluble question
.
Il est ridicule d’écrire
tant de poèmes inutiles
m’a dit la Muse
.
Pourquoi ne pas te contenter
d’en écrire un seul
mais parfait ?
.
Je me le demande
en effet !
.
Note sur le désastre
.
Ce qui se perd en l’infime (et depuis
deux siècles) ruine quotidienne par
la technique qui jette les peuples
dans l’extase téléphonique 4G (ou 5 ou 6...)
c’est la « langue » de notre langage
.
J’entends la langue créatrice
celle qui poétisa l’incompréhensible
le nommant dieu ou cosmos ou univers
en abouchant les solitudes
.
(La ruine – c’est quand on n’image plus !)
.

 

 

Désormais
.
Oh le don romantique de rabibocher le chaos
- perçu « façon puzzle » - qui fut celui des poètes
a passé dans les sciences qui feignent
de ne pas croire en un monodieu mais croient
sans preuve en l’occulte Unité du Monde !
.
À ces pensées « profondes » je préfère
le chant du roitelet au bout d’une ramille
dont la grâce ne fléchit pas sans grâce
Oh lumière c’est là que se berce la merveille
.
Mais ce printemps n’est pas l’ancien
Nous savons à présent que les ans
sont sans retour et que la nostalgie
qui donnait aux choses leur sens
est, elle aussi, souffrance sans retour
.
L’aube à Opio
.
Une tourterelle sur le fil
.
Comme l’aube sent bon
On dirait une nacre ouverte
à l’instant sortie de l’eau
.
Deux tourterelles sur le fil
.
Sur les ailes des cigales les pins
entament la symphonie du mistral
Vibrent les contrebasses branches
.
Deux tourterelles se sont envolées
.
Il ne reste que le chat qui dort
en rond au coin d’une plate-bande
sur une couche d’herbes folles
.
Et le fil - nu comme l’horizon
.
Icône protectrice
.
Lentement laisse-moi mer m’enfuir sur la feinte âme du vent
à l’octave aiguë de ce violon boursouflé qui pourrait
fort bien n’être qu’un nuage aux reflets d’acajou à cause
des rayons infra-rouges du soleil bas lorsque avant
de quitter ma terre il inspecte le soir avec la loupe de l’air
.
Une vapeur de neige au fond de ma poitrine s’effiloche
Il y a comme un torrent glacé qui fond et ruisselle
Soudain je suis terriblement malheureux de ne pouvoir
exciper que de moi - ainsi qu’amande au goût d’acide
prussique emprisonnée dans sa coque étanche
.
Debout à la proue de cet Andrea Doria qu’est mon rêve
la jeune fille d’or fait face à la brume où s’approche
l’étrave sans pitié de ce qu’on prétend « le réel »
Mais son regard pénétrant – le radar de l’amour peut-être ? -
déjoue l’un après l’autre les naufrages qui me guettent
.
Portait du poète en escargot
.
Indolent, l’infini sur son dos enroulé
il lambine, - toujours à la traîne…
Il se souvient de la leçon du lièvre
et de la tortue. (De toutes manières,
les feuilles ne s’enfuient jamais !)

 

 

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18 novembre 2016 5 18 /11 /novembre /2016 11:53
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27 septembre 2015 7 27 /09 /septembre /2015 08:53
FIÉVRES TRANSVERSES
1.
.
Éventail du feu aux nervures de cendre chevelure
grise et fils d’argent
Les mains réunies à contre-nuit avec le frémissement
des frusques du hêtre dans notre dos
La lune aux ailes de roussette vient s’y prendre chaque nuit
Tournoiements tam-tam et danses
.
Les mots se mussent sous les feuilles mortes
comme soleil du soir sous les nuages
suivi de son cortège d’augures à tiares rouges et or
Museau rose et frémissant le lièvre
s’enfonce sous le buisson noir et hanté
.
Aux frontières inimaginables des réfugiés se pressent
Ils suivent des rails obscurs qui ne mènent nulle part
D’où ils viennent les sabres islamiques tranchent les têtes
des femmes et des enfants avec indifférence
.
Une sombre décadence fait lever des spectres sauvages
Leurs oripeaux de sorciers s’accrochent aux ronces du temps
qu’ils entraînent vers les ères barbares d’autrefois
.
L’intelligence des plus humbles s’éteint
Celle de hommes de mémoire se délite
.
Sacres et massacres sont en passe de se succéder à nouveau.
.
2.
.

L’erreur – tenter de justifier ce qui vient
de ce qu’on appelle « le coeur »
à quoi l’on ne s’attendait pas davantage
qu’à cette pulsion salée qui brûle
sous les paupières et trouble soudain la vue
avec des iridescences de pensées
.
Ce qui fait s’ouvrir les fleurs
mêle sang d’aurore pollen et rosée
Sur la place du ciel un être solitaire
s’immole par le feu Icare en chute constamment
recommencée incendie la mer
.
Concrète contamination de lumière
entre les roseaux courbés par la halte d’une volée
de fauvettes mélancoliques Sur les pierres du bord
impulsive luit la joie de l’eau vive
.
L’enfant dont tu tiens la main hésite devant l’oiseau
couleur du tapis de feuilles mortes – qui d’un cri
et trois coups d’ailes s’est envolé sous ses pas
.
Son sourire qui recueille en lui toute l’enfance du monde
avec le naturel d’une fleur sang d’aurore pollen et rosée
.
Comment l’âme en son abîme n’en serait pas embaumée ?
3.
.
Mercredi de bruine Qu’en dire puisque tout est grisâtre
et que le poème n’est pas un journal intime ?
Sorti sous les fines gouttes qui par instant
se plaquent au visage comme toiles d’araignées
mouillées en travers d’un sentier en forêt
fugacement tu respires une odeur de fougères
.
Les affiches des quotidiens monnaient à l’infini les visions
horribles de migrants dont surchargés les bateaux frêles
sombrent et les crimes des islamistes femmes violées têtes
décapitées sabres courbes rituels sanglants haines ancestrales
Je regarde un ami commerçant égyptien avec un malaise
.
Si je le salue c’est l’air pressé sans m’arrêter La pluie
forcit et j’ai négligé d’emporter un parapluie Dans sa vitrine
la statuette d’Anubis reste figée parmi les souvenirs : buste
de Néfertiti et autres pharaons dorés Livres sur sa religion
.
Tu grommelles la tête mouillée remuant des idées
d’abominations dans ta cervelle échauffée par la propagande
des médias Anarchie migratoire Invasion déguisée
.
Devant toi deux jeunes gens une fille jolie un garçon
crâne rasé Elle éclate de rire sous la pluie Lui-aussi :
.
Chez nous les filles peuvent rire avec leurs amants.
.
4.
.
Les faits passés au moulin à paroles
les voici qui s'envolent au moindre souffle
D'abord farine de langage
puis nuages et rêves à pétrir avec levure de pensée
bleu azur et qui sent bon la boulange
des anges
.
Après avoir eu croqué ces drôles de pains
on se retrouve dans la peau d'un Saint François
L'univers autour de nous soudain ne manque plus
d'assise Avec un aplomb nouveau - ou plutôt
une gravité neuve – voici que l'on comprend ce que disent
les oiseaux du matin Leurs louanges à la gloire
de l'aurore ou celles qui font frissonner le crépuscule
d'un pressentiment d'étoiles
.
Lorsque les carpes nonchalantes de l'étang
prononcent en baîllant
les syllabes rythmées du silence en lequel elles planent
des bulles claires de bonheur montent à travers
la transparence jusqu'à la surface de notre esprit
et tout ce que nous voyons prend la couleur du champagne
.
Les arbres à force de jouer les Narcisses dans le miroir
de l'eau finissent par rougir et font au vent sans domicile fixe
l'aumône périodique de quelques feuilles cuivrées
comme jadis à Rome on jetait gling gling gling
au pouilleux assis avec sa crosse près de lui sur le bord
du chemin une poignée d'as
.
Même les fleurs se découvrent un langage
Ce que disent leurs parfums devient limpide et merveilleux
comme paillettes de pollen philosophal
Des herbes s'élève un air oxygéné Partout règne une joie pure
Et si l'on est bien inspiré l'on pourra même apercevoir
le talon rose de la Déesse des Poèmes, qui s'efface
au revers d'une phrase immaculée
haute comme une montagne.
.
5
.
Murmure de la lumière
ruisselant des galaxies poussinières d'étoiles
Toi debout à minuit dehors
les yeux au firmament saisissant de grandeur
.
En bas dans la plaine les clartés infimes
et muettes du village des hommes
Un cimetière avec bougie sur chaque tombe
Et l'océan au-delà, l'océan minuscule -
simple bassine dont la planète secoue les ondes bleues
.
L'immensité de l'Univers a ses racines dans ton coeur
C'est en toi qu'il vient se concevoir
Éther parfumé au jasmin blanc que répandent
les lents battements hexailés des séraphins
.
Que servirait autrement d'être homme
De se détacher après quelques saisons des ramures
de la vie telle une feuille desséchée
pour un bref envol dont l'orbe va finir en pourriture
Que servirait d'être homme
si nous ne pouvions intégrer en l'espace de notre esprit
une altitude qui du zénith au nadir
nous dépasse.
.
6
.
À celui qui s'en va, ne demandez point ses souvenirs !
Ils l'attachent à son chagrin avec la même force
qui relie chacun d'entre nous à son étoile
Son âme qui se défait n'est plus que voeux et larmes
Le tissu de ce qu'il lui reste de vie n'est brodé
que des fantômes les plus sombrement endeuillés
.
Ils font penser à ces êtres de jais des ponchos incas
que l'on retrouve entourant les momies des sépultures
ouvertes au soleil levant comme à Sillustani
Si finement tissés dans la si fine laine de vigogne
si chaude pour lutter contre l'altitude glacée
.
À celui qui s'en va par les hauts sentiers couronnés de stèles
Là-haut parmi d'invisibles pics où l'on s'étonnerait
facilement de ne pas voir planer au soleil vautours et condors
en les mêmes cercles qu'ils font autour des Tours du Silence
.
À celui qui s'en va ne rappelez rien excepté que bientôt
il entrera pour toujours au labyrinthe d'une noire lumière
Qu'il en sera sur son onde à jamais l'écume
.
Que l'amour des vivants s'effacera dans la splendeur avec lui
Qu'il n'aura plus besoin de vivre pour exister
.
Pour être l'occulte cœur de sentences intemporelles.
.
7.
.
Légère cette lame d'eau qui lustre le sable ocre
de son chiffon d'écume et l'astique et le fait reluire
avec l'obstination d'un cireur de bottines
sous le regard placide des grands cocotiers inextricablement
tressés de rêves d'horizon que leur transmet l'azur
Le crabe qui grimpe à leur tronc en voudrait bien sa part
.
La même folie impulse l'élan du beau parleur !
Ainsi qu'une mygale il noue entre eux d'invisibles liens
comme pour en faire la géométrie d'une île exotique
installée au cœur de l'infini et se pique d'une ivresse
alambiquée qu'il extrait de l'alcool des mots !
.
Grimpe, grimpe – jusqu'aux énormes noix – petit crabe !
Chacune est un univers nourricier que toi seul sais ouvrir
Là-haut te bercera le vent toi qui ne crains pas le vertige
L'odeur de mille présences, indicible t'y rejoint...
.
Niché au cœur des palmes tu peux voir au loin
les grands bateaux blancs croiser au large des récifs
Rares sont les navigateurs à venir te déranger ici
.
tant il faut d'expérience entre les passes du corail
pour atteindre au rivage miroitant d'un paradis
.
où légère une lame d'eau lustre les sables ocre.
.
8.
.
Il y a dans les limbes de la forêt une musique
étouffée par la profonde fluidité de la brise
Rien qui ne soit frais concret palpable mais
à la façon du sable qui s'évade entre nos doigts
Une caresse de la matière Un clavier dont on effleure
l'ivoire pour faire à peine chuchoter l'acier des cordes
.
Message mélancolique comme d'une cloche
qui brille au soleil du matin de l'autre côté de la vallée
Sur l'adret de prairies vertes où vivent les heureux
dans leurs abris chapeautés de toits rouges avec éclosion
de fumée en guise de plume d'autruche
.
Une complainte indistincte dont le voyageur doit
restaurer lui-même les paroles si ça lui chante
Les arbres donnent le ton en chuintant de nostalgie
maintenant que le Petit Poucet ne les visite plus
.
Quelque chose que la distance a simplifiée Un résumé
de la vie par l'énoncé de tout ce que l'on a perdu
Beauté féline aux yeux verts et pommettes de velours
.
Un paysage entretressé par les efforts d'hommes et de femmes
que berce une réminiscence ondoyante et iodée
.
Jusqu'à ce rêve de nuage en lequel se confondent terre et mer.
.
9.
.
Ce ne sont plus des osselets ni même une paire
de dés que caresse l'Astragalizonte
mais un vase à deux anses dont le flanc rose en figure noire
affiche un délicat profil d'Apollon... La jeune fille d'or
– son chiton découvrant une épaule adolescente -
fait penser à quelque version pudique de La Source d'Ingres
.
Elle pleure comme le vent dans un poème de Verlaine
quand il cherche partout son coeur disparu
Ou peut-être ne pleure pas et je me fais des idées
tant j'aurais aimé savoir interpréter le masque féminin
Hélas il m'est l'équivalent d'un sphinx indéchiffrable
.
On croyait abolir le hasard en découvrant l'amour
mais le fluide imperceptible dans l'amphore, c'est la vérité
Celle que l'on n'est jamais en mesure de confronter
à elle-même, emporté que l'on est dans le tourbillon du réel
.
Si bien que celui qui n'a pas la force de renoncer
à la chercher radotera durant toute une vie selon le crissement
ironique d'un vieux disque vinyle fameusement rayé
.
Lorsqu'on veut le flatter on dit que ses écrits viennent
et reviennent indéfiniment sur le même sujet comme le ressac
.
Et le poète ainsi finit par se prendre pour le Koh-I-Noor.
.
10.
.
Tenter l'amour, terrible affaire lorsque l'Autre nous est
finalement non moins étranger qu'un dauphin !
Quelle force n'y faut-il pas, quelle indulgence !
Alors seulement l'on s'aperçoit qu'aimer est un vain mot
si l'on n'est pas capable d'amortir en nous-mêmes ce qui
nous apparaît comme la stupidité de l'être qu'on a cru,
.
dans un égarement hormonal, qu'on pourrait chérir sans efforts !
Ici survient la ligne de crête que l'un franchit - non sans peine -
quand l'autre abandonne et redescend dans la foule anonyme.
Aride et froid, sans doute, l'air des hauteurs : l'oxygène pur
et brûlant de ce futur que seuls respirent les héros…
.
Puis l'autre versant de la vie, tout schuss à travers
l'immaculé sous le soleil en soulevant des voiles micacés !
Les choses semblent plus faciles... Les vallées plus accueillantes
comme pour combattre une indifférence nouvelle.
.
Mithridatisés, nous respirons alors le poison des fleurs
sans crainte de nous endormir d'un sommeil illusoire.
Notre regard sur la vie pénètre tout comme de l'eau.
.
Le coeur vaincu de sa propre victoire fait alliance
avec les choses comme si l'univers était désormais ami.
.
S'achève le voyage avec la ligne du quai qui se précise au loin.
.
11.
.
Un doigt de rhum ambré pour le goût de terroir
et pour la fantaisie qui brûle derrière-elle
ses vaisseaux de songe La poussière s'envole
avec le souvenir des îles et des oiseaux sur la mer
Qu'on ne regarde pas la rue et le soleil couchant
s'efforçant d'entraîner les passants au fond des perpectives
.
Je veux rester seul ici avec sur la langue le poème
du rhum amer tandis que proche mon amour s'affaire
dans la maison à mille travaux incertains
Pour elle ils sont la plus douce façon d'aimer
Démarche blonde et silencieuse qui se rit des poèmes !
.
Fleurs et nuit La première étoile se consume
au-dessus du jardin Les pins noirs au profil japonais
guettent l'émergence de la lune entre les tours vitrées
Par la fenêtre ouverte l'air sent l'herbe humide
.
Un doigt de rhum ambré Devant moi dans un espace
imaginaire s'allonge comme ombre du soir
la conscience de vivre 7 x 10 avec une unique étoile
.
De l'autre côté de la Manche un petit garçon attend
le retour de son père au coin de la rue du Héron
.
et de la rue Chaplin Son regard occupe toute ma mémoire.
.
12.
.
Écrire c'est pour toi comme promener ton âme nue
parmi les fleurs d'un verger au printemps
Même ce qui pleure est en forme de millions
de pétales blancs ou roses qui obliquent gaiement
dans le vent Voyez comme le hérisson secoue
ces petits lutins de neige tiède qui viennent jouer les fakirs
.
sur son dos On dirait les flocons de la pleine lune
quand elle s'effeuillait sur les montagnes durant ces nuits
où varappeurs perdus nous attendions dans l'odeur
de menthe du glacier que le jour nous rende la piste
tandis que craquent les séracs et les crevasses effrayées
.
Mais la lumière, la lumière et l'or sur la paroi du granite !
Comme si la vie était subitement un jeu et la mort déboutée
Comme si la trace sur la blanche immensité ouvrait
l'honneur d'une victoire immense sur soi-même
.
Comme si le fil de l'encre était un lien qui pouvait encorder
les mots et sauver le langage des abîmes de l'oubli
Comme si rien ne s'interposait entre l'or des sommets
.
et le bleu profond qui règne dans ton coeur de scribouillard
passionné de ce qui signifie et de ce qui chante la beauté
.
tandis que le monde sombre dans la décadence et l'abjection.
.
13.
.
Fasciné à Murano – il y aura tantôt un demi siècle -
par le souffleur de cristal
aux joues gonflées comme un trompettiste
qui tourne entre ses doigts sa longue sarbacane à l'extrémité
engluée d'un gros poing de transparence incandescente
dans la pénombre de l'atelier au toit vitré
.
De son souffle aussi longtemps qu'elle est plastique
l'homme la tord, la gonfle, l'ajuste, la modèle jusqu'à
sa perfection que le refroidir éternisera
- en un lustre qu'éblouira de beauté la lumière
- en larmes irisées que l'aurore éveillera l'une
.
après l'une de promesses d'étincelles ainsi que rosée
- en vase en lequel viendra se recueillir le plus limpide silence
- en fleurs chargées d'éclats brillants ou cygnes aux cols repliés
ou pièces de vitraux à la découpe de lys
.
Sa magie presque achevée par le figement d'une fluctuation
hypnotique, l'ouvrier saisit une paire de ciseaux spéciaux
et coupe au flanc du pur cristal le reste de cordon ombilical
.
qui retombe englouti dans le bac de silice en fusion
au sein de l'athanor, radieux de la splendeur des formes
.
en attente du souffle savant qui leur donnera l'existence.
.
.
14.
.
Sur la neige du sommeil les pas de ton souffle
crissent dans l'obscurité Secret ressac
de ta respiration Automatisme du corps aimé
Les oliviers sont des anges qui sous la lune
s'éloignent au long du littoral gemmé de lumières
tandis qu'au large passe un paquebot illuminé
.
Images parfumées comme suscitées sous mon front
halluciné par la présence proche de ta chevelure
compagne énigmatique et ravissante de mes heures
Tu t'aventures au pays des mirages et des subterfuges
auquel je n'ai pas accès mais dont tu es la reine
.
Enveloppé de la pénombre de mon insomnie
je me penche sur ta forme devinée Je t'écoute
Craignant que tu n'aies froid je tire sur tes épaules
le drap imprégné de rêve et je souris à mon insu
.
Conscient d'observer au miroir du noir la fragilité
de la vie qui nous garde ensemble et dont je sais
qu'elle finira sans que pour moi se soit élucidé
.
le mystère qu'on nomme femme Et ma pensée
à ce propos tourne en zinzinant dans mon crâne
.
avec la rage d'une guêpe prisonnière d'un bocal.
.
15.
.
La visite fugitive d'une mésange à béret bleu-roi
juste sous l'auvent de la fenêtre où sont suspendues
les graines – quelle intime émotion ! Pourtant
l'on se sent un peut ridicule d'accorder à cette apparition
minuscule une aussi grande importance que s'il
s'agissait de la radieuse incursion d'un ange ;
.
Serait-ce que l'azur au plafond du ciel n'était pas
sec pour que, s'y cognant, la tête du passereau en soit
restée peinte ? Je me plais à caresser de telles fantaisies
parfaitement, bien-entendu, invraisemblables
pour les esprits rassis que ne touche guère la vision
.
d'un petit ventre avien duveté comme fleur de mimosa !
Son coup d'aile, son cri frêle analogue au cri de la Beauté
qui se découvre à l'improviste en la clarté d'un miroir,
moi, qui ne suis qu'homme de vent, tout au contraire
.
me ravissent aussi fort que si j'assistais à l'envol
d'un galet d'or philosophal ! En mon for intérieur,
j'y reconnais l'intuition du fameux solve et coagula
.
par lesquels l'oeuvre chemine année après année
vers la Pierre qui transmute autour de l'adepte
.
toute chose du monde en merveilleux objet d'amour.
.
16.
.
Il nous faut donc ainsi que soixante dix fois depuis
le quatre juillet mil neuf cent quarante quatre, ô
mon âme romantique, nous résigner à ce froid
déclin qui pénètre nos vieux os perclus de rêves ;
quelque chose de noir et nu vibre aux ramifications
du sang, détachant feuille après feuille chaque instant.
.
« Adieu vive clarté de nos étés trop courts !»
J'écoute le murmure désolé des anciens jours,
avec les écureuils qui traversent les feux du soir
entre les branches des pins, le matin des colombes de rosée,
la lune tiède qui hulule dans sa plume comme chouette...
.
Même si s'entendent les craquements de novembre,
déjà, et que s'abattent les gravois crayeux du ciel ;
même si le printemps et l'été se dérobent derrière
les pourpres paravents d'un automne presque achevé,
.
il faut être, en hiver, semblable à cet arbre que fleurit
abondamment une neige peut-être illusoire, mais gaie,
à la nette avant-garde des bois humides, flous et pâles,
.
en retrait, dont le brouillard étreint de ses écharpes
troncs et rameaux du même bleu que celui des veines
.
à la tempe diaphane de la Belle qui est notre amour.
.
.
17.
,
Ce n'est pas une victoire, non plus qu'une défaite, c'est
le temps d'automne, ses rougeurs grâce auxquelles les arbres
se refusent aux insectes, ses brises attestant que les premières
neiges enfarinent les sommets, ses horizons dissous en brumes ;
le souffle un peu court, j'observe un père qui tient son bambin
par la main ; ils entrent au square clairsemé d'autres bambins.
.
Eux vivent leurs saisons avec la fraîcheur de l'inexpérience.
Il apprennent la bruine sur les robiniers, les troènes d'Amérique,
les micocouliers, les sorbiers des oiseaux, les marronniers d'Inde ;
le froissement des nuages dans les frondaisons ensoleillées ;
l'écoulement du sable entre leurs petits doigts en étoile...
.
Il exercent leurs cris à débusquer mille échos consanguins,
qui se fondaient par mimétisme au béton des façades proches...
Leurs jambes vacillantes s'efforcent de traduire ce qu'est la joie
de vivre en suivant les pigeons jusqu'à ce qu'ils s'envolent !
.
Encore deux ou trois automnes et tous ces lutins de bac à sable
seront bavards comme des pies. Ce qu'ils se diront entre eux
fera sourire les vieux qui sur les bancs goûtent le pâle soleil.
.
Peut-être en grandissant l'un de ces enfants lira des poèmes.
Peut-être une fois grandi composera-t-il des vers lui-même.
.
Peut-être est-ce ici-bas la seule activité qui rime à quelque chose.
.
18.
Ἦσαν δὲ οἵδε Ἑλλήνων οἱ ὑπομένοντες τὸν Πέρσην ἐν τούτῳ τῷ χώρῳ, Σπαρτιητέων τε τριηκόσιοι ὁπλῖται...
(Hérodote – VII – 202)
.
Relisant Hérodote, j'en arrive à Léonidas et ses Spartiates,
interposés entre les Grecs au sud, en archipel, et l'océan
immense des bataillons de Xerxès au nord, jusqu'à Trichinos...
J'imagine les laconismes des sombres citoyens de Sparte ;
sous la lune, la nuit, leur attente taciturne en tenant le fameux
défilé de Pylos. « Lourdement armés », précise l'historien.
.
Peu de paroles, dont chacun sait le sens et les conséquences.
Me voici spéculant ; ma pensée dérive à travers les mentalités,
les idiomes et l'histoire de ce qu'on jugeait indispensable
d'exprimer. Comment choisir, dans la rumeur des langues
du globe, ce qu'il y aurait à dire qui ne serait pas vain ?
.
Quels poètes ignorés au sein des peuples ont chacun
par touches insensibles ou vastes sagas, par délicates
élégies ou piquantes satires, privilégié tel ou tel topos
ou formule de leur langue au point de les rendre communes ?
.
Tant de variations autour de l'énigme familière du Chaos,
tant d'analyses, synthèses, réalités diverses, repoussantes,
séduisantes, fines ou grossières, chacune exacte à sa façon !
.
Ah, qu'on aimerait parler tous les idiomes bariolés des îles
heureuses ou des empires du présent et du passé...
.
Leurs univers, à eux, ne connaissaient que l'essentiel !
.
.
19.
.
À travers les visages que je croise en arpentant
le boulevard, têtes de femmes plus ou moins jolies,
d'hommes aux faces qu'on dirait taillées à coups
de serpe, sourires d'enfants vaguement indécis
comme s'ils se demandaient s'ils font bien ou mal,
je discerne toujours l'ossature spectrale des crânes.
.
Par une étrangeté de linguiste maniaque, sans doute,
la même chose se produit lorsque je rencontre les mots
qui me viennent avec la nette intention de s'intégrer
à mon poème. Je sens transparaître leur étymon,
les attaches occultes qui les relient l'un à l'autre.
.
Chaque phrase qui surgit me semble immaculée mais
pétrifiée à la façon d'objets qui auraient longtemps
séjourné dans la transparence d'eaux chaudes dont le
calcaire innocente et transfigure, comme à Pamukkale.
.
L'onde, ainsi, du regard lisant ruisselle, lente, murmurante,
sur le squelette dont s'arme le fond de ma langue natale,
apportant mirages, feu, nuées, à tout ce qui paraissait mort.
.
Chuchotis et vapeur salés, reflets dont un même geste
de la main brise et reconstitue l'écheveau scintillant...
.
Telle est la toujours renaissante vie du langage éternel.
.
20.
.
Verlan, gage des quartiers où l'on va, au resto du coin,
criave une côte de bœuf dure comme botte de keuf !
St Ouen, la Goutte d'Or, St Denis, Sarcelles, Argenteuil,
mondes étranges et bariolés ! Là fourmillent les bipèdes
plus ou moins calmes ou pressés, certains encapuchonnés,
d'autres barbus, ou élégants, ou jeunes, ou patibulaires !
.
J'écoute leur nouveau parler aux accents verts et lents.
Poétique parfois, à sa façon qui n'a point de parenté avec
ni le ciel bleu, ni l'automne, ni la tendresse, ni la beauté !
Ce ne sont que cruautés envers les femmes, haine, drogue,
schlass et kalachs ; pas une larme d'amour là-dedans !
.
Que de cela devraient témoigner les poètes, la sauvagerie
revenue à peine croyait-on l'avoir bannie, nul doute mais
où trouver le Grand Inspiré qui dirait la modernité selon
ce qu'il serait judicieux d'en dire ? Est-ce l'un de ces
.
chanteurs aux sourires plaqués or, voix éraillées, grimaces
balafrées, martelant lourdement des stéréotypes agressifs,
indigents, en lesquels se confondent anarchie et liberté ?
.
Leur langage reproche une violence que lui-même exerce !
(Comme il est triste que si souvent les efforts de justice
.
à la fin versent dans l'injustice, la tricherie et la stupidité.)
.
.
21.
.
À travers l'air vivifiant des mots tel un oiseau d'encre
je retourne vers les cimes des épicéas de la lumière :
halo si doux de l'horizon, qu'en tâtonnant les branches
par mille et mille doigts désignent comme s'il existait
un paradis au-delà de l'abrupt. Sinon, mettons : la mer,
lisse et brillante comme pierre fraîchement cassée !
.
J'ajoute sur la pente, parmi les fleurs du sainfoin
et les gentianes, un petit vacher rêveur qui garde
dix ou douze grandes femelles aux cornes lyriques,
en train brouter le bruit discret de leur mufle humide
et rose, à divers endroits du tapis dru de la prairie.
.
Belles avec leurs taches blanches sur leur robe noire
ainsi que montagnes au printemps, un petit veau bien sûr
poussant du museau vers la tiédeur nutritive des pis...
Tel se présente, avec lune montante et mauve crépuscule,
.
le placide univers dont mon souvenir ramène le troupeau
vers l'étable, aux remugles suffocants pour qui n'est pas
habitué aux odeurs fortes de la vie, aux meuglements
.
des bêtes rangées côte à côte face aux râteliers qui sentent
la pénombre et le foin ; pour qui a perdu en somme toute
.
intime connivence avec ce qu'on appelait jadis Nature.

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1 juillet 2015 3 01 /07 /juillet /2015 08:08
Autre blog : https://xavierbordes.wordpress.com/

https://xavierbordes.wordpress.com/

est un blog tenu à jour régulièrement aussi.

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21 novembre 2014 5 21 /11 /novembre /2014 10:30

Un autre jour

.

La nuit en écoutant les pas dans la neige de sa vieille respiration, il errait à travers les ténèbres, à la recherche de son âme un peu comme on cherche un feu-follet bleuté dans un cimetière.

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Il ne rencontrait que l'absence ambiguë d'une divinité soucieuse de rester voilée par le noir aussi bien que par le bleu et la lumière du jour revenu, dont les rayons s'empêtraient dans la buée des vitres ainsi que des insectes aux fils perlés de rosée d'une toile d'araignée.

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Aux cas les plus extrêmes, la réalité pirouettait, ce qui distrayait le regard, tandis qu'on changeait le décor, suivant le procédé familier aux cirques lorsque les nains envahissent l'arène avant l'entrée en fanfare des magnifiques chevaux dès qu'on a relevé les toiles pourpre et or...

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En fait de chevaux, c'est une horde ronflante d'automobiles qui se rue, sitôt le feu passé au vert, le long de l'avenue. Le volet métallique du boulanger se relève sur une vitrine éclairée derrière laquelle une personne en tablier blanc dispose des croissants et autres viennoiseries.

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La croix verte du pharmacien, qui ne s'éteint jamais, indique 16° ce matin ; on croise un père avec une poussette, qui emmène son enfant endormi à la crèche du quartier. Un pakistanais dépose des papiers publicitaires dans toutes les boîtes aux lettres. Demain est arrivé, et c'est encore la vie.

 

 

 

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