29. Sounion
Sur le promontoire dont les rocs suspendus sur la mer
À contrejour exhaussent les vestiges dédiés à Poséïdôn,
On se croit un moment à la proue de l'Hellade, avec
Le vent qui soulève les flots et nos manteaux unis
Dans l'éblouissant flamboiement du dieu de la poésie !
Inspirer c'est, ici, éprouver l'ivresse fraîche du poème
Qui vous remplit la gorge ainsi qu'un épais vin ciconien,
Tandis que craquent sur les eaux la membrure et les mâts !
C'est comme si tes vers avaient incité jusqu'aux vagues
La nef aventureuse - et figé les trop mouvants récifs :
Il me semble entendre au cœur des feux du large
Le délice ailé des sirènes parmi les embruns citronnés.
La dryade au cheveux blonds erre à travers les ruines ;
Je recueille une pincée de terre et caresse la toison d'un olivier.
Pour un peu, je me serais cru au cap Sigri, près d'Antissa,
Là où la lune de Mytilène passe la nuit en tête à tête
Avec les spectres des poètes, depuis le temps d'Orphée.