34. Terre des Hellènes
L'avion quitté, j'ai marché, j'ai touché la terre
Des Hellènes. Du pays où le langage depuis vingt-six
Siècles doit lutter avec la perfection de la lumière...
Une lumière si haute et si nette que ceux qui s'aiment
N'y peuvent garder le mystère de leurs sentiments,
Que les tombes du Céramique aux reliefs habités
Écoutent dans les pins la voix de l'éternité vacante,
Cet élan venu des milliers de sirènes vaguant sur la mer
Qui chantent encor leur hymne avec l'accent d'Homère...
J'ai foulé cette terre, en mon enfance imaginaire,
Où les guerriers masqués d'or et le casque orné de crins,
Le thorax nu sous la cuirasse d'airain rutilante,
Luttaient, un contre mille, pour sauver leur liberté...
J'ai croisé leurs héritiers, certains parfois nostalgiques
Parmi les ruines de leur civilisation, certains rageant
Contre un secret sentiment de déchéance et prêts
À dénigrer ou trahir la terre si radieuse où ils sont nés.
Mais d'autres, et j'en ai rencontré parmi les Athéniens,
Fiers d'être de la lignée admirable de leurs Ancêtres,
Savaient que cette déchéance avait été pour leur patrie
La chance, à la faveur du ciel immense et de la mer,
D'assurer le salut d'une parole à laquelle l'esprit humain
A pris le don de s'égaler aux dimensions de l'univers.