26. L'illusion du Pirée
Au port du Pirée, entre les ondulations qui portaient
Les coques blanches des voiliers en quartiers d'hiver,
Naïvement, je poursuivais mes rêves. Attablés
À la terrasse déserte d'un restaurant de pêcheurs,
Nous attendions d'être servis ; des chauffages à gaz
En forme de parapluies avaient été allumés car les airs
Du soir font frissonner les dames en décembre.
Naïvement, je poursuivais mes rêves, je voyais
Le port du siècle passé, sans le fronton d'immeubles
Dont les vitrages miroitaient d'un reste de soleil couchant.
La même pleine lune dans le même ciel, et les mêmes
Reflets entrecroisaient leur vif éclat et leurs couleurs
Autour du ponton de bois argenté. Là-bas le môle,
Vers lequel en riant des jeunes gens allaient se promener,
Lançait un vieil éclat périodique, comptant les minutes...
Et moi naïvement, je poursuivais mes rêves comme si
Dans la Grèce d'aujourd'hui, demeuraient en filigrane
Des reliques de l'Hellade que j'aimais, comme si
Dans le mythe de ma vie actuelle, il restait des bribes
D'un pays incertain d'où seraient venus mes aïeux !