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8 novembre 2008 6 08 /11 /novembre /2008 14:15

 

                        Transfiguration



Pétrifié au fond d'une incommensurable nuit

le malade, en écoutant le vent qui passe,

le vent qui froisse, rêve de course et de danse...

Et même s'il n'est plus d'espoir, il espère

envers et contre tout : les miracles, fussent-ils

misérables, ça c'est déjà vu – au coeur de l'infini

turbulent ! Parfois le papillon qui tourne autour



du phare éblouissant qu'est une simple lampe

survit. Chose étrange, ce sursis indéfini :

toute une perspective à revoir, toute une vie,

toute une ville à revoir... La compagnie du vent

qui nous reprend ; son immensité respirable,

la dictée de sa mélopée lointaine, avec écho

d'encens et relents de plain-chant. Ainsi



l'Axion esti du poème qui s'élance prodigieux

comme une nef de cathédrale ! Et du haut

des flèches chantournées, le maître maçon

dans les airs échafaudé contemple l'étoile

de la cité, avec orgueil et incrédulité : d'une telle

altitude, l'architecte serait donc l'Homme ?

Ce serait l'une d'entre ces fourmis bipèdes,



arpentant l'abîme, et dont au couchant l'ombre

s'allonge démesurément à travers la place dallée ?

Ou cette autre, quelconque, qui va ou vient

d'un pas fébrile, à contre-courant de tous,

sans que l'on sache vers où, ni pourquoi ? Seul

le langage, porte ouverte vers l'Ailleurs à l'instar

du torii d'un temple japonais, seul le langage



sait entrevoir quelque chose de l'avenir !

Par la fente de l'horizon, entre terre et ciel,

chaque vers témoigne en secret d'un plus pur

azur ; il est ce regard trop curieux d'enfant

qui lorgne des facettes de la beauté lumineuse

entrevue par un trou de serrure, et tremble

de désir pour cette nudité de diamant solitaire...



Il est cette voix de l'aimée qui, prononçant

une phrase anodine, a pris le ton de qui consent,

et soudain notre coeur guéri s'élance, flamboyant

comme une fusée, vers les étoiles. Et le malade

en écoutant le vent qui passe, le vent qui froisse,

se sent brusquement délesté de sa langueur

mortelle. De la fenêtre un azur inconnu descend



rafraîchi par l'agitation d'innombrables ailes d'anges

transparents, qui s'affairent au rapt d'une âme

prisonnière de son corps inerte et souffrant, afin

de l'emporter d'un coup au-delà du septième ciel !

De là-haut, tel ce maître maçon qui contemple

le maillage étoilé de la cité terrestre, l'artisan

du poème avale une exquise goulée de liberté

puis replonge parmi les ombres quotidiennes.


 

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commentaires

A
wowoo
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